Les Francs-Tireurs et Partisans Français : les FTP-MOI

Publié le par Henri-Ferréol BILLY

Ce cinquième chapitre de l'histoire des FTP fait suite au précédent consacré à leurs principes de fonctionnement.

Chapitre 5 : Les étrangers dans les FTP

Les communistes créérent dans les années 1920 une organisation de type syndicale regroupant les travailleurs d'origine immigrée et qui devint la MOI (Main d'Oeuvre Immigrée). En 1942, la MOI intègre les FTP tout en gardant son organisation propre, devenant la FTP-MOI.

Quand on évoque les étrangers au sein des FTP, on pense tout d'abord au "groupe Manouchian" des FTP-MOI, alors que tous les étrangers n'étaient pas dans la MOI et que les FTP-MOI se trouvaient dans d'autres villes de France que Paris.

L'exemple des étrangers parmi les FTP de l'Allier :

L'Allier étant le département sur lequel j'ai le plus travaillé, il est plus aisé pour moi de le citer en exemple.

La communauté étrangère la plus importante au sein des FTP de l'Allier fut la communauté polonaise, et ce surtout au sein du 203e Bataillon FTP de l'Allier (région de Commentry). On les retrouva essentiellement au sein du camp FTP Müller-Chancot, le nom de MÜLLER devant sûrement venir de cette communauté, mais nous n'avons aucun détail sur le choix de ce nom et son origine. Plusieurs de ses membres subirent la répression allemande notamment lors des 22 et 23 juillet 1944 comme l'explique l'article ci-dessous :

Un détachement FTP de l'Allier était par ailleurs appelé camp MOI polonais ou détachement Dombrowski, du nom du communard polonais Jorslaw DOMBROWSKI tué le 23 mai 1871. Le camp FTP Jean Drouillat comptait également des polonais "très combatifs" dans ses rangs qui seront renvoyés par le colonel COLLIOU de l'AS à la Libération. Enfin, le camp FTP Jean Chauvet avait reçu le renfort de polonais déserteurs de l'armée allemande, et comprenait un groupe d'étrangers commandés par le sergent-chef Mile KAPETANOVITCH dit "Janeck" (28 ans) natif de Srebenica .

L'Allier comprenait également un camp de Guérilleros espagnols qui faisait partie du 201e Bataillon FTP de l'Allier (région nord-ouest). Ils avaient commencé à se regrouper en 1943 dans la région d'Ygrande. Au nombre de 80, ils constituaient la 22e brigade de Guérilleros commandée par Domingo SERRA-PIQUE (31 ans). Ils participèrent à de nombreuses actions de guérilla. Le 8 août 1944, ils secoururent un maquis MUR attaqué par les allemands.

Avait également était constituée la compagnie Alvarez ou camp Mathey, du nom de son chef, le capitaine FTP d'origine espagnole Joseph ALVAREZ dit "Mathet" (33 ans). Cette unité a été identifiée comme unité MOI. Elle comprenait également un résistant allemand, Joseph STRASSER dit Hilt (44 ans).

En septembre 1944, les espagnols quittent les FFI :

Quelques camarades espagnols du groupe qui a participé si glorieusement à la Libération de notre ville [Montluçon] et de notre département nous faisaient hier leurs adieux, simplement comme ils ont combattu. […] Comme je leur disais que nous avions encore besoin d'eux, ils m'ont répondu que leur travail était terminé en France [….]

Le Centre Républicain, 14 septembre 1944

Les FTP-MOI parisiens :

Boris HOLBAN prend leur tête en tant que CE (Commissaire aux Effectifs) en juin 1942 jusqu'à son remplacement en août 1943 par Missak MANOUCHIAN qui était précédemment CT (Commissaire Technique). Missak supervisa l'assassinat de Julius RITTER le 28 septembre 1943. Les Brigades Spéciales 2 (BS2), qui avaient déjà procédé à de nombreuses arrestations de FTP en région parisienne depuis juin, démantelent une partie du réseau FTP-MOI : Missak MANOUCHIAN est arrêté avec Joseph EPSTEIN, responsable inter-régional des FTP le 16 novembre 1943 ainsi que 33 autres combattants parmi lesquels 5 parviendront à s'échapper.

Les 17 et 18 février 1944, ils sont 23 à être condamnés à mort parmi lesquels Olga BANCIC. Ils seront 22 à être fusillés le 21 février 1944 au Mont Valérien. Vous pouvez consulter le fichier excel que j'ai créé et qui condense leurs biographies.

Hommages rendus aux FTP-MOI parisiens
Hommages rendus aux FTP-MOI parisiensHommages rendus aux FTP-MOI parisiens

Hommages rendus aux FTP-MOI parisiens

La place de ces FTP-MOI est restée très importante dans la mémoire collective, notamment à cause de l'affiche rouge de la propagande allemande qui voulait présenter ces étrangers comme un ramassis de criminels.

Si des Français pillent, volent, sabotent et tuent... Ce sont toujours des étrangers qui les commandent. Ce sont toujours des chômeurs et des criminels professionnels qui exécutent. Ce sont toujours des juifs qui les inspirent. C’est l’armée du crime contre la France. Le banditisme n’est pas l’expression du Patriotisme blessé, c’est le complot étranger contre la vie des Français et contre la souveraineté de la France.

Tract allemand annexé à l'affiche rouge

Léo FERRE mis en chanson un poème de Louis ARAGON pour leur rendre hommage :

L'affiche rouge de Léo Ferré (1961)

Pour aller plus loin :

*la page facebook régulièrement mise à jour consacrée aux FTP-MOI.

*le documentaire sur les FTP-MOI de Lyon Mémoire de résistance : FTP-MOI :

Ce film n'a pas la prétention de retracer leur histoire mais, à travers le cas des combattants FTP-MOI (Francs Tireurs et Partisans de la Main d'Oeuvre Immigrée) de Lyon, de répondre aux questions suivantes : Qui étaient-ils ? Pourquoi et comment ont-ils combattu ? Leur engagement, le rôle des femmes dans la résistance et quels souvenirs aujourd'hui...

*reportage sur Rino DELLA NEGRA :

Documentaire sur Rino DELLA NEGRA (2014)

En guise de conclusion :

Il est difficile d'être complet sur un sujet aussi vaste, mais il était important de rappeler la place des étrangers au sein de la Résistance. Egalement, n'oublions pas le rôle de la 9e Compagnie de la 2e Division Blindée du général LECLERC, compagnie appelée "la Nueve" car composée essentiellement de Républicains espagnols et qui entra dans Paris le 24 août 1944 pour aider à la libération de la ville.

Le prochain article s'intéressera aux femmes dans les rangs des FTP.

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