Les magistrats de la section spéciale de Riom

Publié le par Henri-Ferreol BILLY

Le 21 août 1944 "Fabien" exécute l'aspirant Moser. En réaction, le régime de Vichy crée rétroactivement les sections spéciales des cours d'appels.

Créées par la loi du 14 août 1941, publiée au Journal officiel le 23 août et modifiée le 25 août suivant, les sections spéciales ont été instituées par le Gouvernement de Vichy auprès de chaque tribunal militaire ou maritime, ou à défaut auprès d’une section de la cour d’appel, pour juger directement et sans instruction préalable les individus arrêtés en flagrant délit d’infraction pénale résultant d’une activité communiste ou anarchiste. Il s’agit en effet, pour les autorités d’occupation allemandes et l’État français, de lutter rapidement contre toutes formes d’actes de lutte armée de résistance, notamment communistes.

https://francearchives.fr/findingaid/04a4b8a59366fc20f85c7cea7cd09d1a0a47eeb9#:~:text=La%20cr%C3%A9ation%20des%20sections%20sp%C3%A9ciales,colonel%20Fabien%2C%20contre%20Alfons%20Moser%2C

Le texte est disponible sur le site de Gallica directement ici (page 3550).

En-tête de la loi

En-tête de la loi

Plusieurs sections spéciales ont déjà été étudiées comme Paris ou Caen (cf. ci-dessous).

En 1975 est sorti le film "Section spéciale" du réalisateur COSTA-GAVRAS. A voir notamment une vidéo portant sur le tournage.

Affiche du film section spéciale

Affiche du film section spéciale

Bande annonce du film Section Spéciale

La section spéciale de Riom

A Riom, comme dans les autres cours d'appels, une section spéciale est mise en place. Elle comprend un président et quatre conseillers. A Riom, en décembre 1943, en voici la composition :

-le président est Joseph PASSENAUD, né en 1880 et donc âgé de 63 ans. Il est président de chambre à la cour d'appel de Riom depuis mai 1940 ;

-les conseillers sont : François BONIEUX, Eugène de GAYFFIER, Marcel HEUILLARD et Charles PERRIN avec une moyenne d'âge de 58 ans 1/2 (le plus jeune est né en 1889, le plus ancien en 1881) ;

-côté parquet, n'importe quel parquetier peut-être désigné pour siéger. Nous avons relevé le nom de Pierre BOISTARD né en 1901 (un jeune à côté de ses collègues), substitut depuis décembre 1940. On doit notamment à cette équipe la condamnation de 8 FTP du maquis Hoche le 8 décembre 1943 qui seront tous déportés après leur condamnation.

On doit d'autres condamnations à la section spéciale de la cour d'appel de Riom : Hélène BRAGUIER,  Alain JOUBERT ainsi que quatre jeunes FTP du camp Müller. Tous seront déportés.

Et après ?

Quel devenir pour ces magistrats à la Libération ?

À la Libération, se pose de manière près santé la question de la responsabilité des magistrats pour leur attitude sous Vichy. Fortement déconsidérés, ils sont visés par les appels répétés à « épurer », à « châtier » les « traîtres ». Déjà, sous Vichy, cinq ont été exécutés et beaucoup menacés de mort pour avoir condamné des résistants. L'« épuration » est ainsi au cœur de la pérennité du corps judiciaire et, plus fondamentalement, de la justice d'État

https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-de-la-justice-2011-4-page-125.htm

Le président CHASSENAUD et le substitut BOISTARD bénéficient tous deux d'avancements en avril 1945 : le premier est nommé premier président et le second procureur général, tous deux à la cour d'appel de Riom. Tous nos magistrats, exceptés un qui était décédé en septembre 1944, vont bénéficier de la légion d'honneur entre 1946 et 1954. Les magistrats du siège partiront tranquillement à la retraite les uns après les autres entre 1947 et 1954. BOISTARD sera déplacé d'office en 1963 mais vraisemblablement sans lien avec la période de l'Occupation. 

Au vu de ce rapide aperçu on mesure le poids de l'épuration dans la magistrature...

Pour aller plus loin :

 

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